Chapitre 18

—    Allo ?

—    Josh ?

—    Ouais ?

—    J’ai un problème. J’ai besoin que tu viennes au bureau.

—    Maintenant ?

—    Oui.

—    Ok. J’arrive. Répondit le photographe en soupirant de lassitude.

Le jeune homme regarda l’écran lumineux de son portable avant d’appuyer sur la touche « raccrocher ». Ryan l’observa faire, curieux.

—    Qui c’était ?

—    Mon père. Faut que j’aille au bureau. Tu peux rester là si tu veux, j’en aurais pas pour longtemps je pense.

—    Non, je viens avec toi. Il t’a dit pourquoi il voulait te voir ?

—    Pas explicitement. Ça doit encore être un problème avec les mannequins ou les photos. Soupira Josh.

—    Bon bah, je vais m’habiller et j’arrive.

—    Ok.

Ryan se leva et quitta la cuisine en vitesse. Josh baissa les yeux sur son simple jean et se dit que ce ne serait pas du luxe si lui aussi enfilait une chemise. Il ne faisait pas froid mais, il ne se voyait pas sortir torse nu dans la rue. Il risquerait d’y avoir une émeute…

Toujours aussi modeste…

            Le photographe se dirigea vers la salle de bain et décrocha une des ses chemises noires, suspendue derrière la porte, avant de retourner dans l’entrée et d’attraper ses clés de voiture. Ryan arriva aussitôt et ils sortirent de l’appartement. Ils attinrent rapidement le parking et s’installèrent dans le véhicule du roux.

—    Alors pourquoi t’es partit vivre en Australie ?

—    Après le divorce de mes parents, mon père m’a emmené avec lui tandis que Tom est resté avec notre mère. Il a tout simplement demandé ma garde et l’a obtenue. Tom n’étant pas son fils, il l’a laissé à ma mère.

—    T’as jamais eu envie de revenir en France ?

—    Si, souvent. Mais, j’avais mes études à terminer et puis, après ça a été assez compliqué.

—    T’as pas voulu revoir ta famille depuis le temps ?

—    Tom est venu me voir quelques fois et puis, je suis en froid avec ma mère alors bon…

—    T’es retourné la voir depuis que t’es rentré ? Demanda Josh en fronçant les sourcils.

—    Non. Murmura faiblement le jeune homme.

—    Pourquoi ?

Le jeune homme lui répondit par un haussement d’épaule.

—    Tu comptes repartir en Australie ou rester ici ?

—    Je ne sais pas encore.

—    Va la voir. Ça lui fera plaisir.

—    Je sais pas. Ça m’étonnerait.

—    Fais-moi confiance. Elle a surement très envie de te voir.

—    Comment tu pourrais le savoir ?

—    Parce-que, Agathe n’est pas du genre rancunière et qu’elle aime ses enfants plus que tout.

Josh se gara devant les bureaux du magasine, se tourna vers Ryan, qui ne pipait mot, le regard fixé sur le pare-brise, et sortit de la voiture. Le jeune blond, entendant la portière claquer, l’imita aussitôt. Ils entrèrent dans le bâtiment, Ryan suivant son aîné d’un pas trainant et l’esprit ailleurs. Josh connaissait sa propre mère mieux que lui, c’était un comble ! Lui qu’il croyait égoïste, seulement intéressé par sa petite personne, venait de lui prouver le contraire.

—    Ah Josh ! Va dans le studio, ton père t’attend. Déclara Allan, un assistant du patron.

En entrant dans le studio photo, ils croisèrent Max qui les toisa, un sourcil levé. Josh pénétra dans la salle et écarquilla les yeux de stupeur.

—    Mais, qu’est-ce qui s’est passé ici ?

—    C’est ce que j’aimerais savoir ! S’exclama son père qu’il n’avait même pas vu.

Presque tout le matériel de photographie avait disparu. Les appareils photo, les trépieds, les éclairages. La salle était pratiquement vide.

—    Qui est le dernier à être sortit d’ici ? Demanda Josh d’une voix sourde, les poings crispés.

—    Toi. Lui répondit son père d’une voix calme.

Le jeune homme se retourna vers lui, surpris.

—    Il n’y a eu personne d’autre après moi ?

—    Non.

—    Mais alors, qui a volé tout le matériel ?

—    A toi de me le dire. Dit-il en le regardant dans les yeux.

—    Attends… tu ne crois quand même pas que c’est moi ?

—    On t’as vu sortir d’ici très tard hier avec lui. Déclara Lowell en désignant Ryan du doigt.

—    Tu m’expliques ce que j’aurais fait de tout ça ? Pourquoi tout voler alors que j’ai les moyens de me payer l’intégralité de ce qui a disparu ?

—    Ça j’en sais rien. Passe-moi tes clés de voiture.

—    Pourquoi ? Demanda-t-il sur la défensive.

—    Simple vérification. Tu n’es pas en position de refuser je te rappelle.

De mauvaise grâce, Josh sortit ses clés et les tendit à son père sous les yeux de tous les employés qui se trouvaient là, c'est-à-dire une bonne vingtaine de personne. Les ragots allaient tourner et plutôt rapidement, vu toutes les têtes de fouines qui l’observaient avec des yeux curieux.

Lowell quitta la pièce tandis que Josh le suivait du regard. Le jeune homme se retourna et croisa le regard interrogateur de Ryan. Il haussa les épaules. Après tout, il n’avait rien à se reprocher. Le photographe rejoignit son père qui était déjà près de sa voiture. Les employés suivirent le mouvement même sans y avoir été invité et, en quelques minutes, tout le monde se retrouva dehors. Une petite foule se forma autour de la Volvo de Josh, attendant impatiemment le verdict.

Un masque d’arrogance engloba le visage du photographe. Il était sûr de lui. Comment son père pouvait-il douter de lui ?

Lowell mis la clé dans la serrure du coffre de la voiture. Josh observait de manière assurée les gestes de son père. Ryan regardait la scène d’un air inquiet. Une angoisse sourde lui noua l’estomac, il avait un mauvais pressentiment. Qu’allaient-ils découvrir ? Le jeune blond avait une petite idée mais, Josh semblait inconscient de ce qui se passait.

Le coffre s’ouvrit et des exclamations de stupeur firent naître des mouvements dans la foule. Des chuchotements effrénés parcoururent les employés à la vitesse de la lumière.

Le visage du roux se décomposa. Qu’est-ce que c’était que ce bordel ?

Lowell se tourna vers son fils l’air grave. Il fit signe à quelques employés pour qu’ils vident le coffre et ramènent le matériel à sa place originel.

—    Josh. Dans mon bureau. Immédiatement.

Le patron passa devant son fils sans lui accorder un regard et pénétra dans le bâtiment. Josh le suivit silencieusement, trop surpris pour prononcer la moindre parole. Ryan observait la scène d’un air hébété. Comment tout cela avait-il pu se passer ? A peine une demi-heure auparavant, ils étaient tranquillement entrain de discuter chez Josh et maintenant ce dernier était accusé de vol. Le jeune homme suivit à son tour les deux hommes. Comment allait se terminer cette histoire ?

            Quand il arriva devant le bureau du patron, la porte était déjà fermée et seulement quelques bribes étouffées de voix lui parvenaient. Le blond s’adossa au mur et attendit que son amant sorte. La contemplation du mur l’occupa un moment avant qu’il ne remarque une ombre sortir en vitesse d’un bureau. Intrigué, il pénétra dans le bureau en question.

—    Je ne peux pas me permettre de traitement de faveur à ton égard. Déclara Lowell d’un ton calme, un regard glacial braqué sur son fils.

—    Je te répète que je n’ai rien fait !

—    Pas la peine de discuter, les faits sont là.

—    Mais…

—    Pas de mais. Tu es suspendu trois mois pour le moment. Ensuite, on verra.

Josh darda un regard pénétrant sur lui, restant stoïque. Il n’avait même pas voulu entendre sa défense ! Le patron fit un geste ample en direction de la porte.

—    Tu peux y aller.

Le roux n’en revenait pas. Son propre père le congédiait pour une faute qu’il n’avait pas commise. Il se leva lentement de son siège et sortit du bureau un creux dans l’estomac. Le jeune homme quitta les lieux sous les regards intrigués des ses collègues. Enfin, ex-collègues désormais. Il gagna son véhicule et regagna rapidement son appartement.

Ryan entra dans la pièce mal éclairée et y promena son regard. Un simple bureau de taille moyenne avec une fenêtre, face à la porte, donnant sur l’extérieur, une petite bibliothèque en bois, collée contre un mur, à droite, un bureau au centre de la pièce et une rachitique plante verte posée dans un coin, comme abandonnée là par hasard pour tenter d’égayer  un peu le blanc grisâtre des murs. Rien de très original. Le jeune blond appuya sur l’interrupteur pour éclairer l’ensemble. Le néon au-dessus de sa tête s’alluma dans un grésillement assourdissant, diffusant une légère lueur jaunâtre, avant de clignoter frénétiquement et de s’éteindre.

Il avança dans la salle et se posta devant la fenêtre. La vue n’avait rien de terrible, elle donnait sur l’arrière du bâtiment et la sortie des poubelles. Très agréable…

Le jeune homme se détourna s’apprêtant à quitter la pièce quand une feuille blanche négligemment jetée ou oubliée sur le sol, au pied de la bibliothèque attira son regard. Ryan s’avança et ramassa la feuille pour la déposer sur le bureau avant que quelqu’un ne marche dessus. On ne savait jamais, peut-être était-ce important.

Il se figea quand il vit le contenu du papier. D’un côté, il avait eu raison. Ce problème n’était pas arrivé tout seul…